La Russie a déployé une force de frappe impressionnante. Selon les autorités géorgiennes, environ 4 000 soldats auraient pris pied sur le port abkhaze d'Otchamtchyra dimanche. Au même moment, 6 000 hommes de la 58e armée russe, additionnée de "volontaires", prenaient le chemin de l'Ossétie du Sud par le tunnel de Roki, seul point d'accès à la république rebelle à partir de la Russie.
Les forces russes ont rapidement pris le contrôle de Tskhinvali, alors que les troupes géorgiennes se retiraient en direction du sud. Un second front s'est ouvert en Abkhazie, autre république rebelle soutenue par Moscou, alors que des bombardements russes étaient annoncés dans les gorges de Kodori, seule région abkhaze toujours contrôlée par Tbilissi. Le gouvernement séparatiste abkhaze a annoncé qu'une partie de son territoire était "en état de guerre" contre la Géorgie à compter de la nuit de dimanche à lundi. Moscou compte déployer 9 000 soldats supplémentaires en Abkhazie à compter de lundi.
En Ossétie du Sud, la question des réfugiés est préoccupante. Selon la Croix-Rouge, 40 000 personnes seraient déplacées, dont plus de 30 000 dans la seule Ossétie du Sud qui comptait, avant le conflit, 70 000 habitants. Les autorités ossètes évoquent le nombre de 1 600 morts, tandis que l'ambassade russe à Tbilissi parle "d'au moins 2 000 morts civils". Sur les ondes de la radio Echos de Moscou, Arkhan Djemal, un journaliste présent à Tskhinvali, affirme que "presque tous les hommes de 15 ans et plus participaient aux combats. Puisqu'ils étaient faiblement armés, beaucoup d'entre eux ont été tués par les forces géorgiennes".
"Toute l'Ossétie du Sud se trouve sous contrôle russe", affirme au Monde par téléphone Dmitri Sanakoiev, chef de l'administration provisoire progéorgienne dans l'enclave. Il ajoute : "Tskhinvali est totalement détruite. On parle de 1 500 morts. Près de 15 000 Géorgiens ont dû quitter leurs villages. Plus de 20 000 habitants ont quitté Tskhinvali, où il ne reste plus que les militaires russes et les bandes criminelles de Kokoïty ("président" prorusse de l'Ossétie)."
Les réfugiés ossètes se sont essentiellement retrouvés en Ossétie du Nord, côté russe. "L'évacuation des blessés est très difficile. Les infrastructures manquent, les autorités locales annoncent l'ouverture d'un second camp. Et le flux de réfugiés devrait augmenter dans les heures à venir", nous a confié par téléphone, Alan Tskourbaïev, journaliste à Vladikavkaz, la capitale régionale d'Ossétie du Nord. Pour sa part, le premier ministre russe Vladimir Poutine, de passage en Ossétie du Nord, a annoncé l'attribution par la Russie de 10 milliards de roubles (275 millions d'euros) pour la reconstruction des habitations à Tskhinvali et dans l'ensemble de l'Ossétie du Sud.
Les dirigeants russes ont eu des mots très forts pour qualifier l'intervention géorgienne. Reprenant l'expression de M. Poutine prononcée dimanche, le président Dmitri Medvedev a dénoncé un "génocide" perpétré en Ossétie du Sud.
"De la propagande", pour Giga Bokeria, vice-ministre géorgien des affaires étrangères. Dans un entretien téléphonique, M. Bokeria souligne que "l'enjeu n'est pas l'Ossétie ou l'Abkhazie, mais bien l'existence d'un Etat indépendant au sud de la frontière de la Russie. Pour celle-ci, détruire (le président) Saakachvili veut dire détruire la souveraineté géorgienne parce qu'il a été élu démocratiquement". M. Bokeria rappelle aussi " la fin de non-recevoir" opposée par les dirigeants ossètes aux engagements pris par Tbilissi de très large autonomie et d'amnistie pour les combattants.
Les bombardements russes se poursuivent depuis dimanche sur le territoire géorgien. Lundi à l'aube, des frappes aériennes russes ont touché une cible militaire à moins de 5 kilomètres de Tbilissi. " Les Russes ont bombardé des zones qui n'ont rien à voir avec les zones de combat, notamment près de l'aéroport de Tbilissi, dans le port pétrolier de Poti, ainsi qu'autour de Zougdidi", affirme M. Bokeria. " Toute la Géorgie est bombardée. L'armée russe a perdu treize avions, mais elle a mobilisé de gros moyens."
Des bâtiments russes mouillent l'ancre à la limite des eaux territoriales géorgiennes "pour venir en aide à la population russe" des régions séparatistes, selon Moscou. Affirmation contestée par Tbilissi, qui estime être sous le coup d'un embargo maritime. Dans la capitale géorgienne, certaines ambassades ont commencé à évacuer leurs ressortissants.
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